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#INTERVIEW : JÉRÔME CHAUVET

Bonjour Jérôme, la Fédération vient d’annoncer l’arrêt des compétitions amateurs. T’attendais-tu à une telle décision ?

Je ne suis pas surpris de la décision de la Fédération de ne pas faire reprendre les championnats et cela pour plusieurs raisons.
La première reste les raisons sanitaires, qui sont très instables sur l’ensemble du territoire. Il y a encore des zones très sensibles avec notamment l’arrivée des nouveaux variants. On voit également plus de jeunes touchés par la Covid-19, ce qui n’était pas forcément le cas ces derniers mois.

La seconde est la temporalité, c’est-à-dire que reprendre des championnats signifie obligatoirement  faire reprendre les entrainements en amont pour garantir l’intégrité physique des joueurs et des joueuses. Suite à des annonces de la Fédération, on a eu peur de devoir reprendre les championnats avec très peu de temps pour la reprise et les entrainements et la ré-athétisation nécessaire. Cela aurait pu être dangereux pour certaines personnes en manque de préparation. Faire du handball ce n’est pas faire de la course à pied, c’est deux pratiques totalement différentes. Pour  pratiquer ce sport-là on doit pour pouvoir être efficient techniquement et prêt physiquement pour reprendre  la compétition. Il faut protéger le physique des pratiquants.

La troisième raison est l’équité sportive. La Covid-19 a et va avoir des conséquences, et on ne les connait pas encore toutes. Mais certains clubs sont partis avec un effectif défini et des pratiquants ne reprendront pas le handball. L’équité sportive peut être mise à mal.

Quels vont être les impacts sur l’organisation au sein de l’USAM Nîmes Gard concernant le secteur jeune ?

Comme dans toutes mauvaises choses, il y a des bonnes choses. Cela nous a demandé de nous réinventer. Aujourd’hui il y a et il va y avoir une perte de licenciés. Il faut que les clubs travaillent pour mettre en place des dispositifs  afin de ne plus perdre de licenciés. Les premiers axes sur lesquels il faut travailler, c’est le développement de notre pratique. Il faut aller chercher les licenciés en réinvestissant les écoles et reproposer la pratique du handball sous différentes formes. (ex : hand fit, beach handball et peut demain du streethandball) On doit offrir une pratique auprès des jeunes afin de relancer ce sport.

Il y a des âges assez avancés sur lesquels les gens sont fixés dans leur pratique sportive. Quelqu’un découvre le handball, rentre dans la pratique et elle sera celle de toute sa vie. Ce type de licenciés on ne va pas les perdre, ils seront là demain. A contrario, pour ceux dont la pratique n’est pas encore définitivement fixée et font plusieurs activités sportives  et/ou culturelle, il se peut  que ce jeune soit allée vers une autre pratique et ne souhaite plus être licencié dans notre sport.

Notre seconde action où il faut se réinventer suite à cette saison compliquée est la formation et le passage entre -15 et -17. Un club professionnel comme l’USAM Nîmes Gard fonctionne dans un système pyramidal. Un grand club travaille à partir d’une base large, qui au fil de son cursus de formation différentes catégories)  se dirige vers l’élite, à savoir l’équipe première. Forcément pour aller dans ce système élitiste, à des moments de la formation il faut dégrossir les effectifs pour mieux travailler et proposer une large place aux entrainements. On ne peut pas faire de l’élite si on n’entraine pas mieux et plus ceux qui sont les meilleurs. Et malheureusement cela laisse des handballeurs de côté, mais ce qui renforce par la suite les clubs partenaires et périphériques de l’USAM Nîmes Gard.

Aujourd’hui, en -15 on est actuellement avec 4 équipes et 1 équipe en -17. Demain, il faut qu’on lance une nouvelle offre de pratique qu’on pourrait qualifier plutôt de loisir. En -17, on a donc la volonté de créer une nouvelle équipe. Pour cela, il faut qu’il y ait les joueurs, les entraineurs et les créneaux. On va donc travailler tous ensemble pour voir ce qui est réalisable et plus particulièrement avec la Mairie pour les créneaux disponibles.

Comment le club s’est organisé depuis le mois d’Octobre dernier pour garder le lien avec les licenciés ?

La première chose qui nous a sauté  aux yeux c’est l’envie qu’ont nos licenciés de se retrouver. Pourquoi le handballeur fait un sport collectif ? Parce qu’il cherche à avoir des copains, un lien social. Certains sont faits pour des pratiques individuelles et d’autres pour des collectives. Ces derniers ont envie de partager un moment, une activité pour rencontrer des gens et vivre des émotions ensemble. Il était du devoir de l’USAM de maintenir ce lien social !

De plus, la sédentarité chez les jeunes est extrêmement présente. Un jeune qui a fait la démarche de faire du sport pour combattre cela, on doit à minima lui proposer une offre lui permettant de se dépenser physiquement et se « libérer la tête » avec notamment tout ce qu’on vit depuis des mois.

Quels sont les impacts d’une telle saison dans le processus de formation du jeune joueur ?

Tout jeune qui s’arrête dans sa pratique est un jeune qui à minima stagne et qui par la suite régresse, dans sa progression. La construction d’un joueur j’aime bien l’imager comme  un millefeuille : c’est une accumulation de compétences qu’il acquiert au cours de sa formation. Avec cette saison complexe il va y avoir des couches manquantes, ce qui va impacter sur le niveau des joueurs, sur la progression. Le fait de maintenir tous les effectifs, de multiplier les offres de pratiques et  les moments de rassemblements  durant les vacances scolaires au sein de nos différents stages  peut  permettre de rattraper ce retard.

Concernant le Centre de formation vous avez-pu maintenir les entrainements c’est un moindre mal ?

Tout d’abord il est important de souligner qu’on a l’immense chance de pouvoir s’entrainer. Concernant le maintien du travail, on a pu avancer sur deux plans : on a continué à travailler sur les savoirs faires techniquement mais aussi développer l’aspect de la préparation et du développement physique des joueurs, sans avoir de contraintes liées aux compétitions.

Cependant, la compétition est un gros manque dans l’évolution de nos jeunes. Un joueur se forme autour de trois besoins : l’autonomie, l’appartenance et les compétences. A travers la compétition, on retrouve tous ces besoins et tu t’en nourris pour devenir le sportif espéré.

La compétition permet de valider ton travail global que tu as fait pendant la semaine. C’est une évaluation du travail individuel et collectif et le lundi quand tu reviens à l’entraînement  et que tu n’as pas été bon, tu doubles les efforts pour rattraper cela. Et cette étape est manquante pour l’évolution de nos jeunes.

Actuellement tu travailles sans véritablement valider les acquis lors du championnat. Et au fil du temps on sent de la lassitude auprès des joueurs, mais qui reste compréhensible. Le contexte général est déjà très particulier avec le couvre-feu, les cours en distanciel. Avoir entre 18ans et 20ans aujourd’hui est compliqué avec toutes les restrictions actuelles.

On a essayé de compenser cela depuis des mois avec le staff du centre de formation. Puis les différentes blessures au sein de l’équipe professionnelle ont  permis à plusieurs jeunes d’intégrer l’effectif et retrouver un peu de compétition, même si leur temps de jeu est bien évidemment limité pour en tirer des enseignements.